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Arthur Rimbaud
Les Déserts de l'amour

Album Zutique

1872
als 18jähriger

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Die Prosagedichte:

Fragmente zu seiner Poetik

1872 Prosa

Les Déserts de l'amour
- das Geständnis einer grossen Traurigkeit
- Träume des Schnees
- Kälte der Pariser Wintermonate

Album Zutique

Die Zutiste sind Mitglieder einer
Poetengruppe Ende des 19. Jhs., präsidiert von Charles Cros (1842-88),
nach seiner Loslösung vom Parnasse symbolistischer Lyriker,
Rimbaud beteiligte sich daran, als er Mai und Juni mit seinem Geliebten Verlaine
in Paris verbringt und dort auch manch Unfug trieb...

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Les déserts de l'amour

Avertissement

Ces écritures-ci sont d'un jeune, tout jeune homme, dont la vie s'est développée n'importe où; sans mère, sans pays, insoucieux de tout ce qu'on connaît, fuyant toute force morale, comme furent déjà plusieurs pitoyables jeunes hommes. Mais, lui, si ennuyé et si troublé, qu'il ne fit que s'amener à la mort comme à une pudeur terrible et fatale. N'ayant pas aimé de femmes, quoique plein de sang ! - il eut son âme et son coeur, toute sa force, élevés en des erreurs étranges et tristes. Des rêves suivants, - ses amours ! - qui lui vinrent dans ses lits ou dans les rues, et de leur suite et de leur fin, de douces considérations religieuses se dégagent - peut-être se rappellera-ton le sommeil continu des Mahométans légendaires, - braves pourtant et circoncis ! Mais, cette bizarre souffrance possédant une autorité inquiétante, il faut sincèrement désirer que cette âme, égarée parmi nous tous, et qui veut la mort, ce semble, rencontre en cet instant-là des consolations sérieuses et soit digne !

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Les déserts de l'amour

C'est certes la même campagne...

C'est certes la même campagne. La même maison rustique de mes parents: la salle même où les dessus de porte sont des bergeries roussies, avec des armes et des lions. Au dîner, il y a un salon, avec des bougies et des vins et des boiseries rustiques. La table à manger est très-grande. Les servantes ! Elles étaient plusieurs, autant que je m'en suis souvenu. - Il y avait là un de mes jeunes amis anciens, prêtre et vêtu en prêtre, maintenant: c'était pour être plus libre. Je me souviens de sa chambre de pourpre, à vitres de papier jaune: et ses livres, cachés, qui avaient trempé dans l'océan !
Moi j'étais abandonné, dans cette maison de campagne sans fin: lisant dans la cuisine, séchant la boue de mes habits devant les hôtes, aux conversations du salon: ému jusqu'à la mort par le murmure du lait du matin et de la nuit du siècle dernier.
J'étais dans une chambre très sombre: que faisais-je ? Une servante vint près de moi: je puis dire que c'était un petit chien: quoiqu'elle fût belle, et d'une noblesse maternelle inexprimable pour moi: pure, connue, toute charmante ! Elle me pinça le bras.
Je ne me rappelle même plus bien sa figure: ce n'est pas pour me rappeler son bras, dont je roulai la peau dans mes deux doigts: ni sa bouche, que la mienne saisit comme une petite vague désespérée, minant sans fin quelque chose. Je la renversai dans une corbeille de coussins et de toiles de navire, en un coin noir. Je ne me rappelle plus que son pantalon à dentelles blanches. - Puis, ô désespoir, la cloison devint vaguement l'ombre des arbres, et je me suis abîmé sous la tristesse amoureuse de la nuit.

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Les déserts de l'amour

Cette fois, c'est la Femme

Cette fois, c'est la Femme que j'ai vue dans la ville, et à qui j'ai parlé et qui me parle.
J'étais dans une chambre sans lumière. On vint me dire qu'elle était chez moi: et je la vis dans mon lit, toute à moi, sans lumière ! Je fus très ému, et beaucoup parce que c'était la maison de famille: aussi une détresse me prit ! j'étais en haillons, moi, et elle, mondaine, qui se donnait; il lui fallait s'en aller ! Une détresse sans nom, je la pris, et la laissai tomber hors du lit, presque nue; et dans ma faiblesse indicible, je tombai sur elle et me traînai avec elle parmi les tapis sans lumière. La lampe de la famille rougissait l'une après l'autre les chambres voisines. Alors la femme disparut. Je versai plus de larmes que Dieu n'en a pu jamais demander.
Je sortis dans la ville sans fin. O Fatigue ! Noyé dans la nuit sourde et dans la fuite du bonheur. C'était comme une nuit d'hiver, avec une neige pour étouffer le monde décidément. Les amis auxquels je criais: où reste-t-elle, répondaient faussement. Je fus devant les vitrages de là où elle va tous les soirs: je courais dans un jardin enseveli. On m'a repoussé. Je pleurais énormément, à tout cela. Enfin je suis descendu dans un lieu plein de poussière, et assis sur des charpentes, j'ai laissé finir toutes les larmes de mon corps avec cette nuit. - Et mon épuisement me revenait pourtant toujours
J'ai compris qu'elle était à sa vie de tous les jours; et que le tour de bonté serait plus long à se reproduire qu'une étoile. Elle n'est pas revenue, et ne reviendra jamais, l'Adorable qui s'était rendue chez moi, - ce que je n'aurais jamais présumé. - Vrai, cette fois, j'ai pleuré plus que tous les enfants du monde.

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Album Zutique

L'idole.- Sonnet du Trou du Cul

Obscur et froncé comme un oeillet violet
Il respire, humblement tapi parmi la mousse
Humide encor d'amour qui suit la fuite douce
Des Fesses blanches jusqu'au coeur de son ourlet.

Des filaments pareils à des larmes de lait
Ont pleuré, sous le vent cruel qui les repousse,
A travers de petits caillots de marne rousse
Pour s'aller perdre où la pente les appelait.

Mon Rêve s'aboucha souvent à sa ventouse;
Mon âme, du coït matériel jalouse,
En fit son larmier fauve et son nid de sanglots.

C'est l'olive pâmée, et la flûte caline,
C'est le tube où descend la céleste praline:
Chanaan féminin dans les moiteurs enclos !

Alfred Mérat.
P.V.-A.R.

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Album Zutique

Lys

O balancoirs ! ô lys ! clysopompes d'argent !
Dédaigneux des travaux, dédaigneux des famines !
L'Aurore vous emplit d'un amour détergent !
Une douceur de ciel beurre vos étamines !

Armand Silvestre.

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Album Zutique

Les Lèvres closes.

Vu à Rome

Il est, à Rome, à la Sixtine,
Couverte d'emblèmes chrétiens,
Une cassette écarlatine
Où sèchent des nez fort anciens:

Nez d'ascètes de Thébaïde,
Nez de chanoines du Saint Graal
Où se figea la nuit livide,
Et l'ancien plain-chant sépulcral.

Dans leur sécheresse mystique,
Tous les matins, on introduit
De l'immondice schismatique
Qu'en poudre fine on a réduit.

Léon Dierx.
A.R.

Fête galante

Rêveur, Scapin
Gratte un lapin
Sous sa capote.

Colombina,
- Que l'on pina !
- Do, mi, - tapote

L'oeil du lapin
Qui tôt, tapin,
Est en ribote....

Paul Verlaine
AR

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Album Zutique

J'occupais un wagon de troisième

J'occupais un wagon de troisième: un vieux prêtre
Sortit un brûle-gueule et mit à la fenêtre,
Vers les brises, son front très calme aux poils pâlis.
Puis ce chrétien, bravant les brocarts impolis,
S'étant tourné, me fit la demande énergique
Et triste en même temps d'une petite chique
De caporal, - ayant été l'aumônier chef
D'un rejeton royal condamné derechef;
Pour malaxer l'ennui d'un tunnel, sombre veine
Qui s'offre aux voyageurs, près Soissons, ville d'Aisne.

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Album Zutique

Je préfère sans doute

Je préfère sans doute, au printemps, la guinguette
Où des marronniers nains bourgeonne la baguette,
Vers la prairie étroite et communale, au mois
De mai. Des jeunes chiens rabroués bien des fois
Viennent près des Buveurs triturer des jacinthes
De plate-bande. Et c'est, jusqu'aux soirs d'hyacinthe,
Sur la table d'ardoise où, l'an dix-sept cent vingt
Un diacre grava son sobriquet latin
Maigre comme une prose à des vitraux d'église
La toux des flacons noirs qui jamais ne les grise.

François Coppée.
A.R.

*
L'Humanité chaussait le vaste enfant Progrès.

Louis-Xavier de Ricard.
A. Rimbaud.

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Album Zutique

Conneries

I

Jeune goinfre

Casquette
De moire,
Quéquette
D'ivoire,

Toilette
Très noire,
Paul guette
L'armoire,

Projette
Languette
Sur poire,

S'apprête
Baguette,
Et foire

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Album Zutique

II

Paris

Al. Godillot, Gambier,
Galopeau, Volf-Pleyel,
- ô Robinets ! - Menier,
- O Christs ! - Leperdriel !

Kinck, Jacob, Bonbonnel !
Veuillot, Tropmann, Augier !
Gill, Mendès, Manuel,
Guido Gonin ! - Panier

Des Gârces ! L'Hérissé !
Cirages onctueux !
Pains vieux, spiritueux !

Aveugles ! - puis, qui sait ? -
Sergents de ville, Enghiens
Chez soi ! - Soyons chrétiens !

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Album Zutique

Conneries 2' série

I

Cocher ivre

Pouacre
Boit :
Nacre
Voit :

Acre
Loi,
Fiacre
Choit !

Femme
Tombe :
Lombe

Saigne :
- Clame !
Geigne.

A.R

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Album Zutique

Vieux de la vieille !

Aux paysans de l'empereur !
A l'empereur des paysans !
Au fils de Mars,
Au glorieux 18 Mars !
Où le Ciel d'Eugénie a béni les entrailles !

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Album Zutique

Etat de siège ?

Le pauvre postillon, sous le dais de ferblanc,
Chauffant une engelure énorme sous son gant,
Suit son lourd omnibus parmi la rive gauche,
Et de son aine en flamme écarte la sacoche.
Et tandis que, douce ombre où des gendarmes sont,
L'honnête intérieur regarde au ciel profond
La lune se bercer parmi la verte ouate,
Malgré l'édit et l'heure encore délicate,
Et que l'omnibus rentre à l'Odéon, impur
Le débauché glapit au carrefour obscur !

François Coppée.
A.R

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Le balai

C'est un humble balai de chiendent, trop dur
Pour une chambre ou pour la peinture d'un mur.
L'usage en est navrant et ne vaut pas qu'on rie.
Racine prise à quelque ancienne prairie
Son crin inerte sèche : et son manche a blanchi.
Tel un bois d'île à la canicule rougi.
La cordelette semble une tresse gelée.
J'aime de cet objet la saveur désolée
Et j'en voudrais laver tes larges bords de lait,
O Lune où l'esprit de nos Soeurs mortes se plaît.

Ý

F. C.
Arthur RIMBAUD

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Album Zutique

Exil[s]

..................................................................................................
Que l'on s'intéressa souvent, mon cher Conneau !.....
Plus qu'à l'Oncle Vainqueur, au Petit Ramponneau !..
Que tout honnête instinct sort du Peuple débile !....
Hélas ! ! Et qui a fait tourner mal notre bile !....
Et qu'il nous sied déjà de pousser le verrou
Au Vent que les enfants nomment Bari-barou !...
.................................................................................................

Fragment d'une épitre en Vers de Napoléon III, 1871.

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Album Zutique

L'Angelot maudit

Toits bleuâtres et portes blanches
Comme en de nocturnes dimanches,

Au bout de la ville sans bruit,
La Rue est blanche, et c'est la nuit.

La Rue a des maisons étranges
Avec des persiennes d'Anges.

Mais, vers une borne, voici
Accourir, mauvais et transi,

Un noir Angelot qui titube
Ayant trop mangé de jujube.

Il fait caca: puis disparait:
Mais son caca maudit paraît,

Sous la lune sainte qui vaque,
De sang sale un léger cloaque !

Louis Ratisbonne.
A. Rimbaud.

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Album Zutique

Mais enfin, c

Mais enfin, c
Q u'ayant
Je puisse
Et du nom
Rêver la sé
Le tableau
Des animau
Et, loin de
L 'élaborat
D'un Choler

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Les soirs d'été

Les soirs d'été, sous l'oeil ardent des devantures
Quand la sève frémit sous les grilles obscures
Irradiant au pied des grêles marronniers,
Hors de ces groupes noirs, joyeux ou casaniers,
Suceurs du brûle-gueule ou baiseurs du cigare,
Dans le Kiosque mi-pierre étroit où je m'égare,
- Tandis qu'en haut rougoie une annonce d'Ibled, -
Je songe que l'hiver figera le Tibet
D'eau propre qui bruit, apaisant l'onde humaine,
- Et que l'âpre aquilon n'épargne aucune veine.

François Coppée.
A. Rimbaud.

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Album Zutique

Bout-rimés

lévitique
un fauve fessier
matiques,
enou grossier,

apoplectiques,
nassier,
mnastique,
n membre d'acier.

et peinte en bile,
a sébile
in,

n fruit d'Asie,
saisie,
ve d'airain.

A.R

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Album Zutique

Aux livres de chevet

Aux livres de chevet, livres de l'art serein,
Obermann et Genlis, Ver-vert et le Lutrin,
Blasé de nouveauté grisatre et saugrenue,
J'espère, la vieillesse étant enfin venue,
Ajouter le Traité du Docteur Venetti.
Je saurai, revenu du public abêti,
Goûter le charme ancien des dessins nécessaires.
Ecrivain et graveur ont doré les misères
Sexuelles: et c'est, n'est-ce pas, cordial:
Dr Venetti, Traité de l'Amour conjugal.

F. Coppée.
A.R

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Album Zutique

Hypotyposes saturniennes, ex Belmontet.

Quel est donc ce mystère impénétrable et sombre ?
Pourquoi, sans projeter leur voile blanche, sombre
Tout jeune esquif royal gréé ?

Renversons la douleur de nos lacrymatoires. ____
.................................
L'amour veut vivre aux dépens de sa soeur,

L'amitié vit aux dépens de son frère.
..........................................................
Le sceptre, qu'à peine on révère,
N'est que la croix d'un grand calvaire ____
Sur le volcan des nations !

.........................................................................................
Oh ! I'honneur ruisselait sur ta mâle moustache.

Belmontet
archétype Parnassien.

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Les Remembrances du vieillard idiot

Pardon, mon père !
Jeune, aux foires de campagne,
Je cherchais, non le tir banal où tout coup gagne,
Mais l'endroit plein de cris où les ânes, le flanc
Fatigué, déployaient ce long tube sanglant
Que je ne comprends pas encore !...
Et puis ma mère,
Dont la chemise avait une senteur amère
Quoique fripée au bas et jaune comme un fruit,
Ma mère qui montait au lit avec un bruit
- Fils du travail pourtant, - ma mère, avec sa cuisse
De femme mûre, avec ses reins très gros où plisse
Le linge, me donna ces chaleurs que l'on tait !...

Une honte plus crue et plus calme, c'était
Quand ma petite soeur, au retour de la classe,
Ayant usé longtemps ses sabots sur la glace,
Pissait, et regardait s'échapper de sa lèvre
D'en bas serrée et rose, un fil d'urine miève !...

O pardon !
Je songeais à mon père parfois:
Le soir, le jeu de carte et les mots plus grivois,
Le voisin, et moi qu'on écartait, choses vues...
- Car un père est troublant ! - et les choses conçues !..
Son genou, câlineur parfois; son pantalon
Dont mon doigt désirait ouvrir la fente, ... - oh ! non !
Pour avoir le bout, gros, noir et dur, de mon père,
Dont la pileuse main me berçait !...
Je veux taire
Le pot, I'assiette à manche, entrevue au grenier,
Les almanachs couverts en rouge, et le panie
De charpie, et la Bible, et les lieux, et la bonne,
La Sainte-Vierge et le crucifix...
Oh ! personne
Ne fut si fréquemment troublé, comme étonné !
Et maintenant, que le pardon me soit donné:
Puisque les sens infects m'ont mis de leurs victimes,
Je me confesse de l'aveu des jeunes crimes !...
...............................................................................................
Puis ! - qu'il me soit permis de parler au Seigneur !
Pourquoi la puberté tardive et le malheur
Du gland tenace et trop consulté ? Pourquoi l'ombre
Si lente au bas du ventre ? et ces terreurs sans nombre
Comblant toujours la joie ainsi qu'un gravier noir ?
- Moi j'ai toujours été stupéfait ! Quoi savoir ?
.........................................................................
Pardonné ?...
Reprenez la chancelière bleue,
Mon père.
O cette enfance ! ......................................................
.................................................................................................
................................................- et tirons nous la queue !

François Coppée.
A.R.

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Album Zutique

Ressouvenir

Cette année où naquit le Prince impérial
Me laisse un souvenir largement cordial
D'un Paris limpide où des N d'or et de neige
Aux grilles du palais, aux gradins du manège
Eclatent, tricolorement enrubannés.
Dans le remous public des grands chapeaux fanés,
Des chauds gilets à fleurs, des vieilles redingotes,
Et des chants d'ouvriers anciens dans les gargotes,
Sur des châles jonchés l'Empereur marche, noir
Et propre, avec la Sainte espagnole, le soir.

François Coppée.

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Album Zutique

L'enfant qui ramassa les balles

L'enfant qui ramassa les balles, le Pubère
Où circule le sang de l'exil et d'un Père
Illustre, entend germer sa vie avec l'espoir
De sa figure et de sa stature et veut voir
Des rideaux autres que ceux du Trône et des Crèches.
Aussi son buste exquis n'aspire pas aux brèches
De l'Avenir ! - Il a laissé l'ancien jouet.
O son doux rêve ô son bel Enghien * ! Son oeil est
Approfondi par quelque immense solitude;
"Pauvre jeune homme, il a sans doute l'Habitude !"

François Coppée.

* Parce que "Enghien chez soi" !

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